jeudi 9 septembre 2010

Les neurosciences: nouvel outil de prévention en santé publique?


Si les neurosciences sont aujourd'hui pointées du doigt pour leur potentielles dérives en matière d'éthique, de "manipulation intellectuelle" ou "d'utilisation dans les tribunaux", ne peuvent-elles pas devenir de nouveaux outils pour la prévention en santé publique

En matière de tabac, d'obésité, de nutrition ou même d'écologie, elles pourraient en effet aider à mettre en place des campagnes efficaces ou à adopter des comportements plus responsables. En matière de choix, les individus n'adoptent pas toujours un attitude rationnelle. Au contraire, les émotions jouent un rôle important dans les prises de décisions. Si les zones du cerveau mises en jeu pour ces deux composantes semblent différentes, elles n'en restent as moins connectées. A tel point qu'on ne parle non plus 'opposition Rationalité/Emotion mais d'"émorationalité". Vos choix impliquent donc le traitement des deux types d'informations, toutefois vous pouvez tout à fait prendre une décision non rationnelle car dominé par vos émotions (esprit de compétition, inatention, altruisme ...) Pour un exemple, voir l'article sur le jeu de l'Ultimatum.

Comment peut-on se servir des connaissance neuroscientifiques afin d'induire des changements de comportements des individus tout en les laissant à priori maître de leur choix? Afin de mieux illustrer mes dires, voici quelques exemples potentiels d'utilisation des neurosciences dans le cadre de campagnes de prévention:

* En matière de comportements alimentaires: l'introduction de chips de couleur (rouges par exemple) dans le plat fournit au mangeur des indications sur le quantités ingérées. Similaires à des "marqueurs", elles permettent de marquer des arrêts et par là de ralentir le repas et de  limiter le nombre de calories absorbées.

En matière de prévention contre le tabac: les lois anti-tabac - type loi Evin dans les années 1990 - ont toutes échouer à faire fondre la consommation de cigarettes, l'industrie du tabac ayant toujours trouvé des stratégies de contournement. Par exemple, une récente étude a démontré que les images de sponsoring largement diffusées par les marques de cigarettes sont plus efficaces qu'une affiche classique: associer une couleur à un objet sans que la marque ne soit explicitement affichée suffirait à déclencher dans le cerveau d'un fumeur les aires normalement stimulées en cas de récompense nicotinique. Un  tel résultat soutiendrait donc l'intérêt d'interdire les campagnes de publicités basées sur du sponsoring.
De même, les campagnes anti-tabac traditionnelles présentant des messages du type "fumer tue" peinent à toucher le grand public. Mais au delà de cette inefficacité liée à des messages qui n'atteignent que peu le consommateur, c'est du côté du cerveau que l'on peut chercher à comprendre les défauts de ce type de campagne. Une étude surprenante menée à l'Université de Warwick a par exemple démontré que les paquets présentant un message anti-tabac activaient plus fortement les aires cérébrales impliquées dans l'envie de fumer que les paquets qui en étaient dépourvus!!!!!! De même, les images de fin de consommation de tabac (mégot, cendres) et de début (cigarette, allumette) n'auraient pas les même effets sur les fumeurs. De tels résultats pourraient donc fournir des armes pour le design de campagnes anti-tabac plus efficaces.

Mais, même au service d'une noble cause, une telle stratégie ne s'apparenterait-elle pas à du neuromarketing voire à une forme de manipulation?

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